La souveraineté numérique va de pair avec la souveraineté économique et politique. C’est le signe des temps. Pour cette raison, l’Allemagne et la France se sont associées pour se lancer dans une aventure soi-disant colossale : défier les géants américains de la technologie du cloud computing, aussi appelé Internet Cloud. De cette façon, les deux pays espèrent participer à la future économie des données grâce à un puissant réseau de centres de données et avec leur propre technologie, soumise à leur propre législation.
Face à la domination quasi absolue d’Amazon Web Services (AWS), Microsoft, Google et IBM, l’Allemagne et la France ont lancé le projet Gaia-X, appelé à briser l’oligopole actuel sur le vieux continent. Dans le cas de l’Espagne, AWS travaille avec les deux tiers des entreprises IBEX.
Avec ce mouvement, l’Allemagne et la France entrent toutes deux dans une course dont elles partent avec un énorme écart par rapport aux premières places. Mais loin de refuser de se battre, les dirigeants européens se sont engagés à concurrencer les différents clouds américains. En fait, si les entreprises numériques restaient assises et laissaient le temps passer, elles resteraient sous la domination américaine ou chinoise pour toujours. Mais parallèlement aux motivations économiques et politiques, des arguments de confidentialité et de sécurité nationale entrent également en jeu : il est actuellement impossible de contrôler le flux de données qui transite par des dizaines de serveurs sans contrôle des gouvernements européens.
stratégie pro-européenne
Dans une lettre ouverte – publiée dans le journal « Financial Times » – le ministre fédéral de l’Economie Peter Altmaier a appelé ses compatriotes à empêcher les grandes entreprises du cloud de soumettre l’Europe à leurs caprices. Dans le même texte, Altmaier souligne que l’Allemagne et la France ont suffisamment d’expérience pour développer ce type de service, toujours lié au développement numérique et à la compétitivité.
Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie et des Finances, préconise également une coopération avec l’Allemagne et d’autres pays européens qui souhaitent retrouver le leadership technologique perdu.
Pour l’instant, les deux pays ont commencé à concevoir la construction d’un grand nuage franco-allemand, dont les dimensions et caractéristiques futures ne sont pas encore connues. Les premières avancées de Gaia-X se poursuivront au cours des prochains mois avec des propositions qui pourraient être révélatrices pour d’autres voisins du continent, publics et privés. De cette façon, une fois que la créature prend forme, le reste des pays pourrait travailler avec l’Initiative.
En affaires, des multinationales allemandes de la stature SAP, Siemens, Deutsche Telekom, Deutsche Bank et Bosch ont déjà été recrutées dans la cause pro-européenne, le tout dans l’œuf d’une initiative d’une importance stratégique exceptionnelle.
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